SOUND DESIGN
AVANT PROPOS
« Le design sonore ou la conception sonore est l’art d’utiliser des éléments sonores afin d’obtenir un effet désiré » (Wikipédia). »
Si cette définition peut paraitre vague, c’est parce que le champ d’action du sound designer peut englober plusieurs fonctions traditionnelles : compositeur de musique, acousticien, monteur son, bruiteur, illustrateur sonore.
BRÈVE HISTOIRE DU SOUND DESIGN
Le sound design, ou design sonore ou encore conception sonore, s’applique à de nombreux domaines différents.
Il existait déjà au théâtre, où un orchestre faisait des effet sonores avec les instruments pour souligner certaines actions. A la fin du 19e siècle, des phonographes étaient parfois utilisés pour diffuser du son ou de la musique lors de certaines scènes.
Au cinéma muet, il y a eu, très tôt, des accompagnements musicaux en live, puis des bruiteurs équipés parfois de machines à bruit, à côté ou derrière l’écran.
Le bruitage devient un élément incontournable du cinéma avec le travail de Jack Foley (1892-1967) dès les années 30, premier bruiteur du cinéma. D’ailleurs en anglais, le métier de bruiteur se dit « Foley artist ».
C’est plus tard, avec les films Le Parrain (1972) puis surtout Apocalypse Now (1979) de Francis Ford Coppola, que le sound design commence à vraiment exister (bien qu’il ne soit pas considéré comme un métier à part). Le terme serait d’ailleurs inventé par Coppola et Walter Murch.
LE BASCULEMENT
Walter Murch, mixeur son sur Le Parrain, va avoir une initiative très inhabituelle pour l’époque. A la suite de ce procédé, le terme de « sound designer » restera dans le vocabulaire commun et initiera une discipline devenue majeure..
Mixeur son mais aussi monteur sur Apocalypse Now, Murch pose les bases du sound design pour tout le cinéma à venir. Les bruitages sont recréés et travaillés en studio et le film est le premier à être diffusé en 5.1, aujourd’hui une norme au cinéma.
L'INTENTION DU SOUND DESIGN
Le sound design est l’écriture du son.
Le son à l’image, que ce soit de la musique, du bruitage ou du sound design, doit avoir une intention de départ. Son but va être de sublimer l’image, de révéler ce qu’elle ne dit pas, d’en accentuer les contours, pour enfin créer une émotion. Il est donc important de réfléchir en amont et mettre sur papier en quelques lignes l’intention et le but visés avant de manipuler le moindre son.
Un mauvais son pourra nuire à l’ensemble d’une super-production visuelle, et à l’inverse, une bande son bien travaillée apportera de la qualité à une production médiocre.
Le choix de la musique est d’une importance cruciale. C’est elle qui va donner du sens et qui va indiquer inconsciemment au spectateur les émotions à ressentir. La musique peut même aller jusqu’à changer notre perception du jeu d’acteur et des expressions du visage.
Le rôle du sound designer est de créer un équilibre cohérent et entre bruitages, ambiances, dialogues et musiques.
Les sons et les dialogues d’un film doivent être parfaitement synchronisés à l’image et on doit entendre ce que l’on voit. Si le son ne colle pas bien à l’action, celle-ci devient moins crédible. Une manière d’avoir un son crédible est d’enregistrer les sons pendants le tournage, mais pour rendre l’action encore plus crédible, des sons sont quasiment toujours ajoutés en post- production.
Hormis les dialogues (qui sont aussi parfois ré-enregistrés en post-production), un son entendu à l’écran est rarement le son réel de ce qu’on voit. Par exemple, un coup de feu, un bruit de baston, d’épée, ou les sons dans l’espace sont toujours exagérés. Pour un simple bruitage, on va utiliser parfois plusieurs sons superposés et mixés pour le rendre plus vrai que vrai. On va chercher de la crédibilité plutôt que du réalisme, il ne faut pas avoir peur de tromper le spectateur : si un son fonctionne, il fonctionne.
Si on voit quelque chose qui est censé émettre un son, alors il faut que ça émette un son.
A partir du moment où le spectateur remarque le son, où il se rend compte qu’un travail a été fait sur le son, ça signifie que le son prend trop de place, qu’il n’a pas été assez travaillé et subtil. Un bon sound design est au service de l’image et ne doit pas se faire remarquer par le spectateur.
ANALYSE
Dans les extraits suivants, quelles sont les intentions du son ? Pourquoi ces choix, et qu’apportent-ils de particulier à l’image ?
LE VOCABULAIRE DU SOUND DESIGN
Catégories de sons
Le son diégétique : son dont l’origine est physiquement présente dans les plans d’une séquence : dialogues, son d’une radio, bruitages, coups de feu… Tout ce qui est entendu par les personnages à l’écran. Les sons diégétiques peuvent être des sons in ou des sons hors-champs. Dans les deux cas, ces sons sont à priori entendus par le(s) personnage(s).
Les sons extradiégétiques : appelés aussi sons off, désigne tous les sons d’une origine extérieure aux plans : bande originale, sound design d’ambiance, voix d’un narrateur…
L’écoute
Pierre Schaeffer, père de la musique concrète, propose une conception de l’écoute en quatre domaines, ou attitudes d’écoute.
Ouïr : « percevoir par l’oreille », écoute brute et passive du son.
Écouter : percevoir le son comme un indice qui nous signale quelques chose, d’une source qui en est la cause. Les sons sont reconnus comme ce qu’ils sont censés représenter : bruit de pas, téléphone…
Entendre : écouter un son de façon analytique, le qualifier, le situer dans un espace acoustique, en faisant abstraction de sa source. «À chaque répétition d’un son enregistré, j’écoute le même objet, bien que je ne l’entende jamais pareillement; j’en perçois chaque fois de nouveaux aspects, mais je l’identifie toujours comme un objet bien déterminé » Pierre Schaeffer
Comprendre : saisir le sens d’un d’un son, son message, l’émotion qu’il véhicule. Dépend de la sensibilité et la culture de chacun.
Qualifier un son
Timbre = matière = Doux/rugueux, brillant/sombre, clair/étouffé, chaud/froid, dissonant/consonant, métallique/mécanique/organique, épais/fin, simple/complexe
Action = fracasser, gratter, frotter, caresser, taper, vrombir, souffler, pétarader
Espace = Proche/lointain, droite/gauche, haut/bas, sec/réverbérant, dehors/dedans
Fréquence = aigu ou grave
Amplitude = intensité = fort ou faible
Densité = beaucoup ou peu de son
Durée = court, long, continu
Attaque du son = fort (marteau, percussion), faible (violon, vent)
Emotion = bucolique, piquant, comique, agressif, relaxant, stressant
Variation = passage d’un état à un autre
Vocabulaire du sound design
- Drone : texture de son vivante et évolutive qui caractérise et renforce l’atmosphère, atonal. Exemple 1, 2, 3
- Rumble : texture proche du drone mais très grave et profonde. Exemple 1, 2
- BRAAM : Son puissant, grave et profond, utilisé pour créer de la tension et renforcer l’impact dramatique d’une scène. Exemple
- Woosh : son fendant l’air rapidement pour accentuer le dynamisme. Exemples
- Impact : sons d’impacts divers. Exemples
- Riser : son long et très progressif amenant à une rupture brutale. Exemples
- Atmosphère : nappe de sons d’ambiance, agréables et méditatifs, tonal. Exemples
- Ambiance : son ambiant de ville, forêt, plage, etc…
- Glitch : sons de bugs ou défaillances électriques / électroniques. Exemples
BRUIT ? ... MUSIQUE ?
Un son est une sensation auditive engendrée par une vibration mécanique de l’air ou autre matière.
Un bruit se définit comme un son non désiré, souvent caractérisé par une notion de chaos.
La musique peut se définir comme l’organisation harmonieuse et rythmique de sons.
Pourtant, la frontière entre bruit et musique est floue, particulièrement quand il s’agit de sound design. Un bruit peut être très musical, particulièrement quand il accompagne un élément visuel, tandis qu’une musique peut vite devenir du bruit quand elle n’est pas désirée (une musique trop forte qui nous empêche de parler par exemple).